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Ivanowski, mars 2000
Parcourir les courants en sens contraires, élever son veto au droit d'exception :
tel est le devoir de l'affranchi.
Je
la dessine du regard, je ne peux plus reculer, nous irons jusque très
tard, au fond de nous, nous noyer, et dans mes veines les reflets nacrés
de mon âme tatouée, sur ce lancinant refrain fané qui dans mes viscères
tournoie.
L'anatomie d'une folie aux vertus subliminales avérées, car en aucun cas la médiocrité ne doit nous habiter et nous faire siens ; il nous faut parcourir les courants en sens contraire si besoin est, mais en résistance il nous faut rentrer et nous insurger contre la norme avilisante et uniformisante. Mon propos n'est point de sombrer dans l'anarchie, l'homme ayant viscéralement besoin de repères, il ne peut point se satisfaire d'une organisation étatique dépourvue de la contrainte de la norme juridique; la norme dont je parle et contre laquelle je m'insurge est toute autre. La question est : vivons-nous pour exprimer ce qu'il y a de meilleur en nous, ou sommes-nous de sombres cancrelats râmpant face à terre en file indienne et bien alignés ? Je m'insurge contre la correction et ses affres, la convenance et ses afflictions, la normalité et son écœurement, la banalité et sa sordidité atterrante. Il n'y a pas une voie prétracée, un schéma préétabli pour atteindre la salvation de nos âmes, et s'enhardir de pureté préservée et immaculée, il nous faut chaque jour cultiver ce vivier créatif et subversif qui tiraille notre membrane créatrice, et tempête dans notre champ émotionnel et sensoriel. Nous ne devons nous satisfaire de la parole universelle, du préconçu, de la fadeur dans toute sa laideur ; affranchissons-nous de cette langueur agonisante dans laquelle par facilité et fatalité trop souvent, nous sombrons. La folie n'a rien de déraisonnable lorsqu'elle atomise la norme tout en s'autolimitant, il ne s'agit pas alors de la folie destructrice et ravageuse mais d'une force transcendentale, galvanisant les sens vers un absolu indéfinissable et Ultime, une énergie subliminale à canaliser, à la densité et à l'intensité émotionnelle sans commune démesure. Quel est le propre d'un virtuose de la musique? De n'avoir de limite dans l'extériorisation de son âtre créatif, dans l'expression de faculté créatrice ; il ne faut avoir de peur d'un scandale quelconque que le génie créateur dans sa folle frénésie, aurait pu enfanter d'une déviation normative violente et dérangeante. Les tapis soyeux aux linceuls de cachemire ne sont point pour mon âme tailladée, et mon esprit torsadé, car c'est entre les barbelés, que mon épiderme se déchire l'échine pour faire avancer la machine, au gré de la folie, et aux reflux des marées subversives. L'absolu tutoyé ne peut l'être que dans l'expression de sens débridés et décharnés de toutes frontières limitatives. La folie dans son extériorisation la plus pure et dans son transcendantal allant décuples nos faibles forces humaines, nous extirpant l'espace d'un instant du commun des mortels, nous rendant de fait plus humain que quiconque, à un degré paroxystique de ressenti et de vécu. La folie n'est point ce monstre froid déviant et salissant, que les médias peignent. La folie vous éclate au visage dans un vrombissement sourd, une détonation sèche ne supportant de contestation, la vague submergeante et déridante vogue, légère et inspirée, au creux de mon sérail affectif, et les courants aléatoires flirtent avec l'indécision cruelle du sens à éprendre. Trop d'entre nous vivotent ou survivent, alors qu'au bout de leur folie, ils vivraient avec fulgurance, sans concession ni compromis l'espace d'un instant, sentant la puissance gorger leurs veine d'une fiévreuse aliénation euphorisante. Sans drogue ni artifice au gré de la folie s'en aller dans ce pré, s'égarer au loin. Loin de tout trôner sur l'illusoire sommet du ressenti paroxystique, sans dérailler ni dévivre à cette nuance près, sans dérailler ni dévivre. Avec piquant et rugosité, sans lisseur ni fadeur, une aspérité incontournable dans cette âme en tourment, et le clair dessein de l'astre crépusculaire sous les lueurs agonisantes de l'Amour obsessionnel, cette onde déridante et singulière nous guide vers l'Original, l'Unique et l'identifiable, l'unité différente et attirante. Une pensée à peine esquissée en mon crâne virevolte, que par folie, la vie enfin nous submerge, que de cette onde enfin nous ressentions, la vibration unique et tiraillante. La vie en jeu, tel en est l'enjeu, la folie pour moyen et comme Absolu. Abolissons la norme sur l'autel enfumé de la liberté. Cultivons l'exception.
Ivanovszki
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©L'Idéaliste